Vers Une Civilisation Écologique: La Vision Chinoise, Selon Zhang Yongsheng
Dans un contexte mondial confronté à l’urgence climatique, la Chine se distingue par une approche singulière et volontariste en matière de développement durable. En tant que journaliste, j’ai eu l’opportunité d’interviewer Zhang Yongsheng, directeur de l’Institut de la civilisation écologique à l’Académie chinoise des sciences sociales. Au cours de cet entretien, il m’a présenté un panorama des avancées majeures du pays en matière de gouvernance écologique, tout en analysant les leviers mobilisés pour faire émerger un mode de vie bas carbone et les mécanismes politiques, sociaux et économiquesmis en œuvre pour impliquer la société dans cette transformation de grande ampleur.
Une nouvelle pensée à la base de percées historiques
Mr. Zhang est revenu d’abord sur les fondementsidéologiques qui ont permis à la Chine de progresser dans sa construction d’une « civilisation écologique ». Il attribue ces avancéesà une pensée directrice développée par Xi Jinping, centrée sur la valorisation de la nature et la recherche d’un équilibre entre développementéconomique et protection de l’environnement. Selon cette vision, le célèbre adage « les eauxlimpides et les montagnes luxuriantes sont des atouts inestimables » incarne une rupture décisive avec l’idée selon laquelle croissance et écologie seraient nécessairement opposées. Au contraire, la nature est ici perçue comme unesource de richesse à long terme.
Trois types de percées découlent de cette pensée. La première, conceptuelle, consiste à replacer l’écologie au cœur du modèle de développement. La seconde est institutionnelle en ce sens que la protection de l’environnement est désormaisinscrite dans les textes fondamentaux du pays, comme la Constitution, les statuts du Particommuniste et les plans de développement, notamment les plans quinquennaux. La troisièmepercée, enfin, est d’ordre politique, avec la mise en place d’une gestion différenciée du territoirenational. Celui-ci est divisé en plusieurs catégories fonctionnelles – zones de protection prioritaire, de contrôle général et de contrôler en forcé – permettant une gouvernance plus fine et ciblée de l’environnement.
Un modèle de transition qui se veut exemplaire
Pour Zhang Yongsheng, cette démarche n’est pas seulement valable pour la Chine. Elle présenteune portée universelle en ce qu’elle propose de redéfinir les objectifs du développement. Enrecentrant les priorités sur l’amélioration du bien-être et des conditions de vie de la population, tout en respectant les lois de la nature, la Chine entend offrir une alternative aux modèles classiques, souvent sources de crises écologiques.
Il a rappelé que cette transition repose sur un effort collectif et progressif, nourri à la fois par des choix politiques stratégiques et par unemobilisation sociale croissante. La pensée de Xi Jinping, selon lui, apporte des éléments de réponse aux grands défis planétaires, enréconciliant croissance, bien-être et durabilité.
Impliquer toute la société dans la transition écologique
Au-delà des cadres politiques et institutionnels, la réussite de cette transformation écologiquerepose sur l’implication active de la population, de l’avis de Zhang Yongsheng. Le concept de « faible émission de carbone pour tous » prend icitout son sens. Zhang Yongsheng note que cesdernières années, un changement de mentalitéprofond s’est opéré, particulièrement chez les jeunes générations. On observe une prise de conscience accrue des enjeux écologiques et unevolonté d’adopter des comportements plus durables, tant dans les habitudes quotidiennesque dans les choix de consommation.
Ce changement d’attitude s’est égalementpropagé au monde économique. De plus en plus d’entreprises intègrent des pratiques vertes dans leur production, conscientes à la fois de leurresponsabilité environnementale et de l’intérêtcroissant des consommateurs pour les produitsdurables. Cette dynamique collective commence déjà à produire des effets concrets et mesurablessur la trajectoire écologique du pays.
Gouvernement et marché : deux piliers d’uneparticipation renforcée
Pour pérenniser cette dynamique et l’amplifier, Zhang Yongsheng a identifié deux leviers essentiels que sont le rôle moteur du gouvernement et celui du marché. Le premier agit par la régulation, la sensibilisation et la mise en place de politiques publiques incitatives. Il s’agit notamment d’encourager les citoyens à adopter un mode de vie sobre en carbone enmultipliant les initiatives éducatives et les infrastructures adaptées.
Le second levier est celui du marché, qui joue un rôle clé dans le développement d’une économieverte. En proposant des produits et services écologiques à la fois innovants, accessibles et compétitifs, il permet aux choix durables de s’imposer naturellement dans la vie quotidiennedes citoyens. Cette complémentarité entre politique publique et dynamique économique estau cœur de la stratégie chinoise.
Un aspect essentiel de cette stratégie, a soulignéZhang Yongsheng, est la facilitation. Pour que les comportements écologiques deviennent unenorme sociale, il faut en simplifier l’adoption. Cela passe par la mise en place de transports encommun performants et abordables, de circuits courts de distribution, ou encore de systèmesd’incitation pour l’achat de produits verts. Lorsque les choix écologiques sont aussi les plus simples, leur diffusion dans la population s’accélère naturellement.
Une voie chinoise pour un développementdurable mondial
L’entretien avec Zhang Yongsheng met enlumière une vision ambitieuse et systémique du développement durable. En s’appuyant sur unepensée politique innovante, des réformesinstitutionnelles profondes et une mobilisationprogressive de la société par l’action conjointe du gouvernement et du marché, la Chine entendbâtir une civilisation écologique qui soit à la foismoderne et respectueuse de la nature. Cette expérience, encore en cours, pourrait inspirer d’autres pays à repenser leur propre modèle de développement à l’aune des défis environnementaux du XXIe siècle.
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