Augmentation Des Tarifs Douaniers: Une Mesure Improductive

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(Note de l’éditeur : Cet article représente le point de vue de l’auteur Karim Badolo et pas nécessairement celui de CGTN.)

Sous le prétexte que les droits de douane protégeant et créant des emplois font croître l’économie américaine et augmenter les recettes fiscales, le président américain, Donald Trump, a décidé unilatéralement de l’augmentation des tarifs douaniers sur les importations d’acier et d’aluminium. Cette décision qui entrera en vigueur le 4 mars prochain annonce les prémices d’une mesure improductive pour le commerce à l’échelle mondiale. Comme en 2018 sous son premier mandat, Donald Trump foule aux pieds les règles du commerce international pour ne mettre en avant que les seuls intérêts des États-Unis.

Dans un monde incertain en proie à des conflits, l’augmentation des tarifs douaniers décidée par Trump aura des conséquences fâcheuses chez ses voisins immédiats, le Canada et le Mexique, en Europe, en Asie et en Afrique. C’est le commerce mondial qui se trouve dans la tourmente avec les visées protectionnistes entretenues par Trump et son administration. Les accords de libre-échange signés avec les États-Unis devenant caducs. Déjà les tarifs douaniers de 25 % sur l’acier et l’aluminium ont commencé à impacter le cours de l’or sur le marché mondial. En plus de ses décisions unilatérales sur les règles régissant le commerce mondial, Donald Trump menace de répliquer par des tarifs réciproques pour répondre aux pays qui imposeront également des droits douaniers aux produits américains.

Le protectionnisme brandi par l’administration Trump comme un instrument de puissance est loin de produire l’effet escompté. Les tarifs douaniers, de l’avis de bon nombre d’analystes économiques, vont non seulement entraîner une inflation aux États-Unis, mais aussi impacter l’économie américaine dans son ensemble. Contrairement aux promesses d’emplois que l’augmentation des taxes douanières pourrait occasionner, c’est le consommateur américain qui devra débourser plus pour acquérir certains produits dans la mesure où l’importateur sera dans l’obligation de répercuter le coût des droits de douane. Selon Ouattara Boubacar, rédacteur en chef de « Malijet », il s’agit d’une politique destinée à anéantir les nouvelles puissances montantes. Pour Jean-Marie Nkamboua, rédacteur en chef du journal « L’avenir » en République Démocratique du Congo (RDC), Trump, nuit à l’économie mondiale avec son slogan de « America first ». De l’avis de Gérard Njoya, rédacteur en chef de « l’Actu Chine-Cameroon », cette fixation douanière va nuire aux relations commerciales multilatérales, perturber les chaînes d’approvisionnement mondial et créer enfin une instabilité économique mondiale.

Donald Trump promet d’autres tarifs douaniers sur  les voitures, les produits pharmaceutiques, les puces électroniques, pour dit-on, créer plus d’emplois aux États-Unis. A y voir de près, ces décisions qui vont tomber en cascade n’augurent rien de bon pour les États-Unis en premier comme voudrait le faire croire Trump, obnubilé qu’il est par son penchant isolationniste. La première puissance économique court le risque de voir ses avantages commerciaux réduits avec certains partenaires importants. Selon nos confères de la BBC, en Afrique des pays comme le Nigéria, le Kenya, le Ghana, l’Angola et l’Afrique du Sud figurent parmi les principaux partenaires commerciaux des États-Unis en Afrique, avec un important commerce bilatéral de biens et de services. Les importations américaines de biens en provenance d’Afrique du Sud ont totalisé 14,6 milliards de dollars, avec des produits tels que des perles, des pierres précieuses et des métaux en provenance d’Afrique du Sud, en 2022, selon les estimations de l’Office of the US Trade Representative. A cela, il faut ajouter des produits comme l’or, le cacao, l’uranium, l’aluminium, le fer et l’acier qui sont importés des pays africains comme le Ghana, la Côte d’Ivoire, la Gambie et le Sénégal, avec les avantages qu’offrent l’AGOA (African Growth and Opportunity Act). L’AGOA, cette loi commerciale américaine qui permet aux pays d’Afrique subsaharienne éligibles d’exporter des marchandises vers les États-Unis sans payer de droits de douane. L’arrivée de Trump au pouvoir fait peser des inquiétudes sur l’AGOA d’autant plus que la loi de 2024 sur le renouvellement et l’amélioration de l’AGOA (AGOA Renewal and Improvement Act), qui suggère une prolongation jusqu’en 2041, n’a pas été adoptée avant le départ du président Joe Biden. Ce qui fait dire à Solange Tangamu, journaliste de « Forum des As » en RDC, que les tarifs douaniers décidés par Trump vont affecter les pays en développement. Carine Pierrette Zongo, journaliste de « Filinfo » au Burkina Faso, trouve que si cette situation continue, elle risque de rendre la vie plus difficile pour les pays les plus pauvres.

Que ce soit avec ses voisins immédiats le Canada et le Mexique, l’Union européenne, la Chine ou le reste du monde, les frictions commerciales que veut créer Donald Trump est contre-productive à tout point de vue dans un marché mondial interconnecté et régi par des règles qui protègent les intérêts de tous. C’est plutôt dans une approche inclusive qui privilégie la concertation et le dialogue que les intérêts économiques de toutes les parties seront préservés au service de la croissance mondiale. Vouloir conduire le monde sur une base unilatérale avec en ligne de mire la primauté des intérêts des États-Unis, c’est se mettre dangereusement en marge de la marche du monde. C’est donc un impératif de sortir des logiques belliqueuses pour non seulement maintenir la croissance économique, mais aussi œuvrer en faveur de la résolution des conflits qui minent le monde. Comme le souligne Salahadine Mahamat Sabour, journaliste de l’Agence Tchadienne de Presse et d’Edition, tous les pays gagneraient à se mettre ensemble et à travailler avec sincérité et transparence pour une cohabitation pacifique.

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