Togo : Pourquoi ce sont Seulement Les 41 Sénateurs Élus Qui Participeront À La 1ère Séance Ce 6 mars
La première séance inaugurale du Sénat du Togo, prévue pour demain, 6 mars, sera marquée par la participation exclusive des 41 sénateurs élus. Cette session sera d’une importance capitale, non seulement pour le lancement officiel de la nouvelle législature, mais aussi pour l’organisation du Sénat. En effet, ce sont uniquement les sénateurs élus qui prendront part à cette séance. Un expert en droit constitutionnel, ayant requis l’anonymat, nous explique les raisons de cette distinction et la manière dont les sénateurs élus et nommés prennent leurs fonctions.
Une organisation conforme à la Constitution
L’Ordonnance n° 2024-001/PR du 5 novembre sur le Sénat, stipule dans son Article 3, alinéa 4 que : « Le Sénat se réunit de plein droit le deuxième jeudi qui suit la proclamation des résultats définitifs des élections sénatoriales. » Cela signifie que, conformément à cette ordonnance, la première réunion du Sénat doit avoir lieu automatiquement le deuxième jeudi après la proclamation des résultats définitifs des élections sénatoriales, sans qu’aucune autre décision préalable ne soit nécessaire. Cette réunion est essentielle pour l’installation du Sénat, y compris l’élection du président et des autres membres du bureau.
Les sénateurs élus : Une entrée en fonction immédiate
Les 41 sénateurs élus prennent officiellement fonction lors de cette première séance. Ils sont choisis par un collège électoral composé de députés, de conseillers municipaux et de conseillers régionaux, qui les désignent pour un mandat de cinq ans. Lors de cette première réunion, ils prêteront serment, un acte symbolique et solennel qui marque le début de leur mandat. C’est également lors de cette séance qu’ils procéderont à l’élection du président du Sénat et à la constitution du bureau de l’institution, notamment les vice-présidents, les questeurs et les secrétaires.
L’expert précise : « Les sénateurs élus bénéficient d’une légitimité démocratique indirecte, puisqu’ils sont choisis par des grands électeurs eux-mêmes élus. C’est pourquoi cette première séance est exclusivement réservée à ceux qui ont été élus par ce collège.«
Les sénateurs nommés : Une prise de fonction ultérieure
En revanche, les sénateurs nommés ne participeront pas à cette première séance. Ces sénateurs, qui représentent un tiers des membres du Sénat, sont désignés par le Président de la République selon les dispositions transitoires.
Leur prise de fonction se fait après cette première réunion.
L’expert souligne que « les sénateurs nommés prendront fonction ultérieurement, une fois leur nomination officielle publiée par décret présidentiel. Ce processus intervient après que les sénateurs élus aient été installés et après la première session de l’institution.«
Le Bureau d’Âge : Un Rôle Majeur dans l’Organisation de la Première Séance
En début de session, un élément essentiel garantissant le bon déroulement de l’assemblée est l’instauration du bureau d’âge. Dans le cadre de la première séance inaugurale du Sénat togolais, ce bureau d’âge sera constitué des sénateurs élus les plus âgés. Leur mission principale sera de présider cette première réunion, en attendant l’élection du président et la mise en place du bureau permanent. Il s’agit d’une procédure standard dans de nombreuses assemblées délibérantes, visant à assurer une transition fluide et ordonnée.
Le bureau d’âge assure donc la régularité des premières étapes de la séance, veille à la conformité des procédures et supervise l’élection du président du Sénat ainsi que la constitution du bureau, évitant ainsi toute paralysie ou confusion.
Une légitimité différente mais des pouvoirs équivalents
Bien que les sénateurs élus et nommés n’aient pas le même mode d’entrée en fonction, leurs pouvoirs au Sénat sont équivalents. Une fois en poste, les sénateurs, qu’ils soient élus ou nommés, exercent les mêmes responsabilités : participer aux débats, voter les lois et gérer les affaires internes du Sénat. La différence réside principalement dans leur légitimité. Les sénateurs élus bénéficient d’une légitimité populaire indirecte, tandis que les sénateurs nommés sont choisis pour leur expertise ou leur représentation d’institutions particulières.
Ils peuvent être choisis sur proposition après consultation d’institutions et de corps intermédiaires, comme les présidents de conseils régionaux ou certaines organisations professionnelles.
Une mise en place ordonnée et équilibrée
L’organisation du Sénat togolais, qui sépare les sénateurs élus et nommés dans le processus de prise de fonction, permet de garantir un équilibre entre légitimité démocratique et expertise institutionnelle. En effet, bien que les 41 sénateurs élus soient les seuls à participer à la première séance de demain, 6 mars, les sénateurs nommés entreront en fonction ultérieurement, une fois la phase d’installation initiale achevée. Ce système assure une transition fluide et ordonnée, tout en garantissant une représentation équilibrée au sein du Sénat.
Ainsi, la première séance du Sénat, marquée par l’élection du président et la mise en place du bureau, constituera une étape importante dans l’organisation de l’institution et dans l’entame des travaux législatifs au Togo.
Et c’est dans ce contexte que naît Le Cadre de Réflexion et d’Action (CRA) : Une Opposition aux Contours Flous
Dans ce cadre institutionnel, un nouveau regroupement de partis politiques et d’acteurs de la société civile, le Cadre de Réflexion et d’Action (CRA), a émergé. Ce mouvement se positionne comme une force d’opposition à la 5e République et à la nouvelle constitution, qu’il qualifie de « forfaiture » et de coup d’État, dénonçant le système politique actuel comme une rupture avec les principes démocratiques.
Cependant, bien que le CRA affiche une position de contestation, plusieurs observateurs se demandent si cette nouvelle organisation parviendra t-elle réellement à proposer une alternative solide et crédible au Togo. En appelant au retour à la Constitution de la 4e république, qui a pourtant été largement mise de côté depuis plusieurs années, le CRA semble plutôt vouloir remettre en question les réformes institutionnelles du pays, sans présenter une vision claire et cohérente pour l’avenir politique du Togo.
Le manque de définition précise de ses objectifs et la multiplicité des groupes qui composent le CRA ajoutent à la confusion. Bien que la critique du système actuel puisse légitimement trouver écho auprès de certaines franges de la population, il est légitime de se demander si ce regroupement parviendra à incarner une opposition constructive et fédératrice, ou s’il finira par se perdre dans une logique de contestation pure et simple comme ses prédécesseurs, sans véritable projet de gouvernance pour le pays.
Ainsi, alors que le CRA va de se positionner comme un défenseur des valeurs démocratiques, ses choix et sa démarche devront être suivis de près pour évaluer leur impact réel sur la politique togolaise. Le temps dira si cette opposition saura apporter une véritable dynamique de changement ou si elle restera une voix de plus inaudible dans le paysage politique, sans pouvoir ni impact significatif.
En outre, le 23 mars, une date qui semble importante pour le CRA, ce dernier annonce la tenue d’un grand meeting pour faire entendre sa voix. Toutefois, avec une ligne de revendication qui peine à trouver un écho solide dans le cœur de la population, il n’est pas difficile de prévoir un échec retentissant pour cet événement. Le mot d’ordre, flou et manquant de substance, ne semble pas suffisamment accrocheur pour mobiliser massivement les Togolais. Au contraire, comme cela a été le cas pour de nombreux rassemblements précédents de ce genre, ce meeting risque bien de connaître un flop aussi retentissant que les précédents. Le public, déjà sceptique face aux promesses d’une opposition fragmentée, pourrait bien ne pas répondre à l’appel, renforçant l’idée que le CRA, malgré ses critiques et son discours virulent, manque d’une véritable force de proposition capable de fédérer au-delà de ses rangs.
Pierre Leboeuf